#ChallengeAZ (2019) – Q comme Quinze (SOSA 15)

Clarice RIGHI – Source : Archives familiales

Il y a certains de mes ancêtres dont je suis tellement fier que je crains parfois que l’admiration que j’éprouve à leur égard rende l’histoire de leur vie bien trop romancée et lisse pour être réelle.

C’est le cas de mon arrière-grand-mère : Clarice RIGHI, ma SOSA 15.

Acte de naissance de Clarice Righi – Source : Archives familiales

Clarice naît le 23/05/1894 à Montefiorino, près de Modène, dans une Italie unifiée depuis près de 30 ans. Cette même Italie qui connaît une croissance démographique exceptionnelle au XIXème siècle, poussant bon nombre de ses ressortissants sur les routes, en direction des pays voisins, dont la France.

C’est dans ce contexte que Clarice pose ses valises en France à l’âge de 14 ans, ne sachant ni lire ni écrire dans sa propre langue, ni même parler le français.

Une fois arrivée, elle n’eut qu’un seul objectif en tête, s’exprimer dans le langage de Victor Hugo, et apprendre à lire et écrire dans cette langue. Non seulement elle réussit à atteindre ce but seule en parfaite autodidacte, mais une fois adulte, Clarice fut capable de s’exprimer dans un français sans accent.

Elle ne parlerait plus italien, à l’exception des fois où son frère, mineur de bauxite à Gardanne lui rendrait visite. Sa langue d’origine n’a donc pas été transmise à ses descendants.

Elle épousa François DAUMERGUE le 28/06/1919 à Hyères.

Clarice RIGHI & François DAUMERGUE
– Source : Archives familiales
Acte de mariage Daumergue x Righi – Source : Archives municipales d’Hyères

Bien que François possédait des ascendances italiennes, jamais elle n’aurait épousé un Italien, jugeant la culture de son pays d’origine trop patriarcale pour ses envies de liberté et d’émancipation.

Etait-ce au point de devenir une Française à part entière? A ce sujet les sources dont je dispose diffèrent.

Lors d’une demande à la sous-direction de l’accès à la Nationalité Française du Ministère de l’Intérieur, il m’est indiqué que Clarice Righi n’a pas acquis la nationalité française.

Courrier de réponse de la sous-direction de l’accès à la Nationalité Française du Ministère de l’Intérieur – Source : Archives familiales

Paradoxalement, en 1956, sur sa carte d’immatriculation et d’affiliation à la Sécurité Sociale du Var, il est indiqué une nationalité française, sous le prénom francisé de Claire.

Carte d’immatriculation et d’affiliation à la Sécurité Sociale du Var – Source : Archives familiales

Alors? Italienne ou Française?

Qu’importe. Française, Italienne ou même les deux, Clarice Righi reste pour moi un modèle de réussite. Capable, illettrée, d’émigrer dans un pays dont elle ne connaissait pas la langue et d’apprendre à lire et à écrire dans cette nouvelle langue.

Clarice Righi – Source : Archives familiales

Si aujourd’hui les Italiens sont considérés comme nos frères européens, n’oublions jamais qu’il n’y a pas si longtemps de cela, de lourds préjugés étaient véhiculés sur eux, comme celui de voler le pain des Français. Parler l’italien était une honte pour les immigrants. Ceci a certainement expliqué la volonté de Clarice de maîtriser la langue de Molière.

Grâce à elle j’ai compris que d’être fier de son pays n’est pas incompatible avec l’idée qu’une part de nous provienne d’un ailleurs.

Son émigration a fait de ses descendants, dont je fais partie, des Français comme n’importe quels autres Français. Son sacrifice a fait ce que nous sommes, a fait de moi ce que je suis. Elle est et restera pour moi une héroïne, l’incarnation du rêve français du début du XXème siècle.

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